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L’ABC de la « Sagesse managériale » – Excès et modération : tout est subjectif


Les spots publicitaires, la mode, les démarches marketing en tout genre nous vantent que pour vivre pleinement, pour s’épanouir, il faudrait dépasser ses limites, ou plutôt refuser les limites, les propos trop consensuels, les comportements trop modérés et les organisations jugées trop figées. Le paradoxe étant d’ailleurs que l’on incite à se différencier tout en suivant une mode qui uniformise….

Par Alain Hemmer – Consultant Cabinet Gerusia

Déclinés dans le monde professionnel, cette prétendue quête d’épanouissement refuse l’autorité qui dit-on bride la créativité, la hiérarchie qui soumet, l’appartenance au groupe qui gomme les différences. On retrouve la même position de refus et de contestation exprimée vis-à-vis dans la vie publique vis-à-vis des « politiques » et des services publics (par essence collectifs et devant répondre au besoin général de la société) sous prétexte qu’ils ne répondent pas pleinement à chacune des attentes individuelles.

Dans ce contexte individualisé et égocentré, l’idée dominante est que l’autre et donc la société mettent des limites à la liberté d’action et d’expression, et donc empêchent d’exprimer pleinement son soi-disant potentiel, ses prétendus talents…. Le sujet de la liberté individuelle n’est pas nouveau puisqu’on dit que sa propre liberté s’arrête là où commence celles des autres. La question est donc toujours l’équilibre à trouver entre la liberté de l’individu et le fonctionnement collectif, et la réponse dépend souvent du côté duquel on regarde cet équilibre.

Si le point de vue individuel est désormais bien plus visible, et audible en particulier grâce aux nouveaux médias, le monde professionnel a aussi une responsabilité dans ce comportement individualisé, parfois poussé à l’extrême. Les « optimisations » diverses qui ont réduit les collaborateurs, supprimé la hiérarchie, ont de fait augmenté le rôle de l’individu.

Vouloir que chacun donne le meilleur de lui-même au bénéfice de l’entreprise est légitime, favoriser une émulation voire concurrence entre les collaborateurs, fixer des objectifs individuels ambitieux mais parfois inatteignables sont-ils réellement la meilleure façon d’y arriver ?

Force est de constater l’importance actuelle des risques psychosociaux, ce mal-être induit ou aggravé souvent par des comportements individuels « excessifs », que ce soit entre le client et l’entreprise, entre les collaborateurs, entre les managers et les collaborateurs.

Si les politiques d’entreprise mentionnent toujours l’épanouissement du collaborateur à son poste de travail, l’importance de la cohésion et de la performance collective, la réalité des exigences économiques, contractuelles, financières, temporelles semble plutôt engendrer des relations peu bienveillantes. Les excès de langage se banalisent et les managers comme les collaborateurs n’ont même plus conscience d’y contribuer, sachant que l’excès ne se juge pas toujours objectivement dans une règle bien établie mais plutôt subjectivement selon les personnes en présence.

Ainsi, par exemple, la pugnacité pour défendre une opinion, la ténacité face à l’adversité sont de réelles qualités personnelles, tant qu’elles n’induisent pas des comportements ou des propos inadaptés ou mal perçus. On peut tout dire, tout dépendant bien sûr de la façon dont on le dit et à qui on le dit.